La littérature n’est pas faite que d’histoires à l’eau de rose. Elle est parfois le centre des critiques les plus virulentes qui ont mené aux plus grands scandales. Le scandale et son acolyte, la censure, ce que tout auteur cherche à éviter, ont malheureusement fait de nombreuses victimes dans l’histoire littéraire.
La liste est longue, on retrouve notamment ces titres célèbres comme :
- Les Misérables de Victor Hugo
- Madame Bovary de Flaubert
- 1984 de Georges Orwell
- Ulysse de James Joyce
- Nana d’Emile Zola
- Frankenstein de Mary Shelley
- Lolita de Vladimir Nabokov
- Les liaisons dangereuses de Laclos
- J’irai cracher sur vos tombes de Boris Vian
- La Maison d’Emma Becker
- Le Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde
Et la liste est loin d’être exhaustive…
Cinq d’entre eux ont retenu notre attention et leurs histoires sont tout aussi surprenantes les unes que les autres.
Madame Bovary de Flaubert
La belle et douce Emma Bovary, mariée à Charles Bovary, se voit déçue de son mariage qui ne répond pas à ses attendus romantiques lus dans les livres. Elle décide alors de débuter une liaison avec Rodolphe pour combler sa frustration. Ces scènes d’infidélité sont insupportables pour la prude petite bourgeoisie. Au fil de l’œuvre, les liaisons se multiplient. Emma ne se complait pas dans cet environnement, et ne trouvant pas entières satisfaction, elle finira par se suicider dans d’atroces conditions.
C’est donc le 16 avril 1857, le jour de la parution de l’œuvre, que le scandale éclate. Les détracteurs de Madame Bovary s’insurge contre le personnage d’Emma qui pourrait transmettre de mauvaises idées aux jeunes filles.
Le célèbre et répugnant avocat Ernest Pinard, surnommé « Le crapaud », s’occupe du réquisitoire contre cette œuvre. Le roman est alors condamnée pour « outrage à la morale publique et religieuse ».
L’avocat ne fait donc pas la distinction entre le personnage fictif d’Emma et l’auteur Flaubert.
Ce dernier sera finalement acquitté et Madame Bovary deviendra l’œuvre que nous connaissons toutes et tous aujourd’hui.
Ce procès est représentatif de la politique de censure du Second Empire qu’exerce le XIXe siècle dans tous les domaines. Ernest Pinard trouvera une deuxième cible : Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire.
Le portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde
En restant toujours au XIXe siècle, mais cette fois-ci dans l’univers anglophone, Le Portrait de Dorian Gray du talentueux Oscar Wilde a lui aussi fait scandale.
Dorian Gray, portrait du dandy, est un personnage placé sous le signe de l’excès et de la liberté notamment sexuelle. Ce cher et charmant Dorian représente alors à lui-seul le péché, idée épouvantable pour la société victorienne. Oscar Wilde, dans les années 1890, révèle son homosexualité. La critique littéraire ainsi que le public ne peuvent consentir à de telle chose. L’œuvre est donc censurée et l’auteur se voit dans l’obligation de remanier son texte.
Ce n’est qu’en 2011, plus d’un siècle plus tard, que des universitaires décident de rendre public et disponible la véritable version de 1891.
La Maison d’Emma Becker
Notre sélection se termine par une œuvre extrêmement récente intitulée : La Maison. En reprenant les termes de Jauss, « l’horizon d’attente » qui gravite autour de ce titre fait écho à un lieu chaleureusement et familièrement réconfortant. Mais… La Maison est un bordel dans lequel l’autrice a travaillé pendant 2 ans à Berlin.
Elle raconte alors son expérience en invitant le lecteur à suivre ses joies et peines. L’écriture, quasiment poétique de ce récit inédit, trouve un héritage littéraire lui aussi scandaleux comme Nana de Zola, ou alors Fantine la prostituée des Misérables d’Hugo. Tout est sensible dans cette œuvre, ce qui la rend d’autant plus touchante.
La lecture de l’incipit vous persuadera certainement à lire cette œuvre :
« La Maison me manque. La façon dont le soleil du matin tombait sur le vieux parquet, les filles s’ébrouant à l’ouverture ; peut-être que j’exagère la beauté des chairs, la chanson des rires, l’allégresse de la fin de journée, cette magie insaisissable lorsque je m’arrêtais à l’entrée du salon pour les regarder. […] J’ai toujours cru que j’écrivais sur les hommes. Je ne peux relire mes livres sans m’apercevoir que je n’ai jamais écrit que sur les femmes. »
Bien que La Maison ait gagné le prix du Roman de l’Etudiant 2019, la fermeture des esprits de la grande majorité du public français s’est indignée. Le caractère inédit de ce livre est réjouissant, mais a malheureusement divisé les lecteurs.
Ce voyage scandaleux touche à sa fin et espère avoir suscité votre intérêt.